La guerre de Succession d'Espagne
Le 1er novembre 1700, le roi d'Espagne Charles II meurt après avoir cédé par testament son trône à Philippe d'Anjou, petit-fils de Louis XIV. Cette situation place la France et l’Espagne en position de force sur l’échiquier européen. En effet, en cas de décès de son grand-père, Philippe règnerait sur les deux nations. Le fragile équilibre des États est brisé. D’une part, les Habsbourg du Saint Empire romain germanique apparentés à la couronne espagnole revendiquent le trône, d’autre part l'Angleterre et les Pays-Bas redoutent l’union de deux grandes puissances coloniales qui leur ôterait la maîtrise des océans. Dès 1701, les principales nations européennes se coalisent contre la France et l’Espagne. C’est le début d’un conflit auquel le traité d’Utrecht de 1713 mettra fin.
Le conflit dans les Alpes
Dans les Alpes, la guerre ne commence vraiment qu’en 1703, après la rupture de la fragile alliance franco-savoyarde : la Savoie avait déjà menacé la France lors de la guerre de la Ligue d’Augsbourg en 1692. En 1708, Victor-Amédée II, duc de Savoie, renverse les Français au col de l’Échelle et ses armées parviennent jusqu’à La Vachette. Les Savoyards, repoussés par les milices briançonnaises, décampent, brûlent le village de Montgenèvre et s’emparent des forts d’Exilles et de Fenestrelles. Le versant italien est alors considéré comme perdu. En 1709, le maréchal de Berwick est à la tête de l'armée chargée de défendre les frontières du Briançonnais. Devant la difficulté de contrôler un territoire montagneux avec des troupes à faible effectif, il opte pour le principe d’une guerre de mouvement à partir de Briançon. Ses troupes, basées dans des fortifications de campagne, marchent en fonction des évolutions de l’ennemi. Bien que cette brillante stratégie limite les intrusions frontalières, elle ne peut redresser la situation. Les positions se figent de part et d’autre.
Le Traité d'Utrecht en Briançonnais
Le 11 avril 1713, Louis XIV signe à Utrecht un traité avec chaque puissance belligérante. Il cède au duc de Savoie « tout ce qui est à l’eau pendante des Alpes, du côté du Piedmont » soit 32 communautés qui faisaient partie intégrante du territoire briançonnais depuis l’établissement de la Grande Charte des Escartons de 1343. En compensation, la vallée de Barcelonnette, soit 11 communautés, est rattachée à la France, offrant à Louis XIV une vue sur les territoires savoyards des Alpes Maritimes. Briançon perd ses principales ressources agricoles qui se trouvaient en territoire piémontais et la route du Mont-Genèvre tombe en désuétude. Elle le restera jusqu’au Consulat. La ville, économiquement ruinée, devient la « porte de la France » Elle sera convertie entre 1721 et 1734 en place de guerre fortifiée sur ses hauteurs par une barrière infranchissable. Des familles entières, séparées par la nouvelle frontière, émigreront en France. À chaque nouveau conflit, les populations des deux versants, conservant des liens culturels et linguistiques, espèreront une nouvelle union, mais les « vallées cédées » resteront définitivement savoyardes puis italiennes.
Carte des escartons. En gris foncé, les territoires donnés au duc de Savoie au traité d'Utrecht, en clair, ceux restés français.
Vous voulez en savoir plus, le service du Patrimoine a édité les actes du colloque franco-italien de Briançon (2013), en vente à l'accueil/boutique.
Service du Patrimoine - Philippe Delmas